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Mad God

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MAD GOD

Titre original : Mad God
Nationalité :
États-Unis
Date de sortie : 26 avril 2023
Réalisation : Phil Tippett
Photo : Chris Morley et Phil Tippett
Musique : Dan Wool
Casting : Alex Cox, Niketa Roman, Satish Ratakonda, Harper Taylor, Brynn Taylor

Mad God est une malédiction. Rares sont les œuvres qui hantent ma mémoire des jours après leur visionnage. Entre angoisses et fascination, cet « ofni » n’a cessé de revenir me rendre visite, augmentant sa dimension spectrale, insaisissable. Voir un film après ce curieux objet expérimental s’avère compliqué, ses images cauchemardesques vampirisant tout ce qui suit.

Mad God

          Comment décrire une expérience aussi radicale ? L’exercice est complexe mais essayons.
          Mad God est un film d’animation mutique développé depuis trente ans par Phil Tippett, (le ?) maître des effets spéciaux au cinéma. Ce nom ne vous dit rien ? Vous avez pourtant probablement pu observer son travail, le monsieur ayant apporté son savoir-faire à Star Wars, Indiana Jones, Robocop, Starship Troopers, Jurassik Park et même Twilight. 

          Grand spécialiste de l’animation en stop motion, Tippett commence à travailler sur ce projet à la fin des années 80. Durant la production du premier Jurassik Park (sorti en 1993), voyant la technologie évoluer fortement, il met son projet en pause avant de le reprendre vingt ans plus tard, accompagné d’employés de son studio venant participer au développement du film bénévolement.
          La beauté de l’histoire commence déjà ici. C’est en effet par les efforts conjoints de personnes passionnées et dévouées que ce long-métrage singulier a pu voir le jour (ou plutôt la nuit).

Mad God

          Pour appréhender l’œuvre en elle-même, il faut d’emblée accepter de perdre ses repères de spectateur. Phil Tippett met en scène un personnage au visage dissimulé, descendant à l’infini dans les tréfonds d’une ville en ruine, habitée par une panoplie de créatures toutes plus monstrueuses les unes que les autres. 
          L’épouvantable vacarme dans lequel le lieu baigne ne fait que renforcer le caractère oppressant de cette déambulation dans ce qui pourrait s’apparenter à un tableau de Jérôme Bosch, prenant vie sous nos yeux. 

          Rechercher un sens à tout ça est vain. Le cinéaste ne nous y invite pas non plus : « Impossible de décrire Mad God. Pour moi, c’est comme créer un récit que le public va lui-même compléter. »
          On peut seulement l’interpréter comme un pur cauchemar, un trip sensoriel dérangeant et impactant. On peut aussi y voir une parabole de l’emballement de la mondialisation, fabriquant des ouvriers voués à mourir une fois leur tâche accomplie. Ce monde désolé est un endroit où l’on suffoque, dans lequel les baragouinages d’un bébé où la trotteuse perverse d’une horloge, dictent les gestes répétitifs des abominations qui le jalonnent. 

Le Jardin des délices, Jérôme Bosch
Panneau de droite, Le Jardin des délices, Jérôme Bosch, entre 1490 et 1500
Mad God
Les "shit men" de Mad God

          La multiplication des textures, des matières et des techniques rendent ce voyage infernal d’autant plus prégnant et viscéral. Mais la raison pour laquelle on glisse de l’essai original et radical aux mots, pesés, de grand film voire de chef-d’œuvre, c’est la persistance des images au-delà du temps de la projection. Comme sous hypnose, je suis sorti de la salle en croyant que l’univers du métrage avait contaminé le notre. J’en étais à craindre la nuit à venir, soupçonnant que mon subconscient me plonge à nouveau dans les ténèbres.

          Vous l’aurez compris, Mad God n’est pas tellement un film, c’est une expérience. Une expérience dont on ne sort pas indemne. Une expérience insoutenable mais envoûtante, rare et donc précieuse, donnant la sensation étrange d’être face à un objet artistique intemporel et universel. 

EN BREF

Mad God est une  expérience rare d’hypnose cinématographique. Cet étrange film construit un univers lugubre, peuplé de créatures inquiétantes plongées dans un mouvement infernal et infini. Une pure vision cauchemardesque qui tourmente durablement notre mémoire. Un chef-d’œuvre inclassable. 

5/5

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3 Comments

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