Je commençais à désespérer. Entre le bon mais fanservicieux The Mandalorian et la catastrophe qu’est Le Livre de Boba Fett, je me disais que Disney semblait incapable de proposer une production dépassant les acquis de la saga intergalactique. Chaque film ou série réalisés sous l’égide de la maison aux grandes oreilles cochait toutes les cases d’un cahier des charges bien précis. Mettons un personnage iconique, un petit droïde, un Jedi et reprenons le squelette scénaristique de ce qui a fait le succès de Star Wars et tout le monde sera heureux. Ou pas…
Andor, en reprenant ce qu’avait initié le rafraichissant Rogue One, prouve que cet univers, qui s’étend depuis 1977, possède encore quelques contrées inexplorées.
Pourtant, j’étais dubitatif. Préquel d’un préquel, je craignais que la série ne soit qu’un produit contant l’origine de l’origine avant l’origine. Or il n’en est rien. Quelle surprise de découvrir une production prenant le temps d’introduire correctement ses personnages et ses enjeux tout en explorant divers genres cinématographiques bien connus.
La construction du récit en plusieurs segments relativement distincts est la plus grande réussite de la série. En faisant appel aux codes du film de braquage, d’évasion, du thriller politique ou encore du film d’enquête, on explore par la même les arcanes de la galaxie lointaine, très lointaine. Les scénaristes ont pris soin de mettre en place plusieurs arcs narratifs qui convergent vers notre héros, et nous offrent ainsi une galerie de personnages et de lieux jusqu’alors inconnus pour les étrangers à l’univers étendu (dont je fais partie).
En s’éloignant de la grande histoire pour raconter la petite, Andor se permet d’abandonner quelques principes qui font normalement le sel de Star Wars, en particulier le manichéisme. Adieu donc l’éternel conflit entre bien et mal, entre Jedi et Sith, entre Empire et Rébellion. En revanche, bienvenue aux personnages flous, oeuvrant pour le bien commun malgré leurs motivations peu vertueuses. Bienvenue aux soldats aliénés de l’Empire, qui acceptent l’horreur pour simplement survivre.
Pour une fois, on nous emmène dans une zone grise, profondément humaine, proche des individus et de leur quotidien. Des ouvriers de Ferrix aux religieux d’Aldhani, en passant par la haute bourgeoisie de Coruscant et les prisonniers de Narkina 5, Andor réussit ce qu’avait tenté maladroitement la prélogie. On y comprend enfin mieux l’organisation de l’Empire, les liens unissant les différentes planètes, le fonctionnement des civilisations sous l’envahisseur, les rapports de pouvoir et les désaccords au sein de la résistance.
Point d’homme ou de femme providentiels ici, simplement un Cassian Andor taciturne, réunissant presque malgré lui ceux et celles qui formeront la bien connue alliance rebelle. Un succès autant narratif que visuel, qui nous montre enfin ce que le mot galaxie représente.
Seule ombre au tableau : le relatif flop de la série menée par Tony Gilroy, qui a réuni moins de spectateurs qu’Obi-Wan, Grogu ou Boba Fett. Nous aurons malgré cela la chance de voir une saison 2, déjà en tournage, en espérant qu’elle garde toutes les qualités de la première.
EN BREF
Andor impressionne par la maîtrise de ses nombreux arcs narratifs. On y découvre des décors variés et de nombreux personnages sur lesquels on prend le temps de s’attarder. À la croisée des genres cinématographiques, la série nous balade dans les rouages de l’Empire et nous révèle tout en nuances la naissance de l’Alliance Rebelle. Emmené par un Diego Luna subtil et convaincant, le dernier show Disney est de loin la meilleure chose arrivée à Lucasfilm depuis un bon moment.