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en plein feu affiche

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EN PLEIN FEU

Titre original : En Plein Feu
Nationalité :
France
Date de sortie : 8 mars 2023
Réalisation : Quentin Reynaud
Photo : Vincent Mathias
Musique : Delphine Malausséna
Casting : Alex Lutz, André Dussollier, Sophie Parel

          En réponse aux spectateurs désabusés par une prétendue fadeur du cinéma français, il y a des films comme En Plein Feu qui viennent nous rappeler que l’inventivité ne se retrouve pas qu’outre Atlantique. Non dénué de défauts, le long-métrage se montre pourtant ambitieux, crédible, et prouve s’il était nécessaire qu’en dépit de budgets maigres pour ce type de production, l’hexagone compte des cinéastes prêts à aborder le film de genre de manière astucieuse et solide. 

EN PLEIN FEU

          Au coeur d’un incendie frappant la forêt des Landes, Simon (Alex Lutz) et son père Simon (André Dussollier) prennent leur voiture pour évacuer les lieux. Ils se retrouvent cependant coincés dans des embouteillages, au milieu d’un paysage devenant de plus en plus hostile. Doivent-ils attendre patiemment que la situation s’améliore ou prendre le risque de braver le brasier pour survivre ?

          Ce qui frappe en premier lieu dans En Plein Feu, c’est la confrontation des personnages à une catastrophe directement liée à la grande problématique de notre époque, le dérèglement climatique. Le film a en effet été tourné après les incendies dévastateurs ayant eu lieu aux États-Unis et en Australie, et un an avant ceux qui ont ravagé les forêts françaises, dont celle des Landes. 
          Toutefois cette confrontation restera toujours au second plan, en tant que menace immédiate à laquelle il faut échapper. Il n’est justement jamais abordé, même succinctement, la question du dérèglement climatique, responsable du désastre faisant fuir les protagonistes. L’étrange calme avec lequel Simon et son père se plient à l’évacuation donne au film un ton pessimiste et d’autant plus inquiétant.
          Le réchauffement du climat et les catastrophes naturelles basculent dans le monde d’après, celui où ils ne sont plus un sujet, mais un décor, une toile de fond. 

          L’absence de questionnements ou d’échanges des personnages sur cette question a pour effet de la rendre encore plus prégnante. Il n’est plus l’heure de projeter, d’imaginer, il est l’heure de vivre avec cette réalité dérangeante. Le monde d’après évoqué plus haut est en fait le monde d’aujourd’hui. Et c’est avec simplicité, subtilité et une grande lisibilité que Quentin Reynaud fait ce constat alarmant. 
          Cette présence brillant par son absence donne au film un ton désabusé, affichant clairement l’impuissance des individus face aux forces naturelles qui menacent leur vie, rappelant discrètement que sans décisions fortes venant d’en haut, le bas de l’échelle est condamné à « vivre avec ».

          Le réalisateur dépeint un monde ou l’espoir est de courte durée, souvent confronté à une réalité cruelle. Un monde où la visibilité est constamment obstruée (arbres, fumée), donnant à l’horizon, autrement dit l’avenir, une valeur d’incertitude.
          C’est avec une mise en scène soignée et discrète qu’il rend l’environnement irrespirable, progressivement oppressant, parfois aidé par quelques effets spéciaux réussis. Les gros plans sur les visages nous confrontent à l’immédiateté de l’action, qui dénote avec le self control des deux hommes (au début de l’évacuation en tout cas). 
          En plus de ces effets visuels, le travail énorme sur le son accentue l’urgence de la situation, et surtout la confusion qui règne alors que les flammes se rapprochent. Le mixage met quasiment au même niveau les voix des comédiens à celles émanant du talkie walkie ou de la radio qui les informent en temps réel sur la marche à suivre. Parfois, trois voix se superposent rendant la scène incompréhensible et toujours plus suffocante.

EN PLEIN FEU

          Toutes ces qualités confèrent au long-métrage une grand efficacité, que ce soit dans sa narration donc, mais aussi dans la conception de ses dialogues et dans la caractérisation de ses personnages. À l’image du reste, tout est construit de manière directe, subtile et intelligible.
          Cela n’empêche pas Quentin Reynaud de, parfois, se perdre dans des explications un peu trop psychologisantes vis-à-vis des deux hommes qui tiennent le récit. Le traumatisme de Simon et son expérience du deuil viennent à mon sens alourdir une expérience filmique qui n’en avait pas forcément besoin, même si le grand talent d’Alex Lutz et André Dussollier donne corps à cette thématique. 

          Un petit arbre imparfait selon moi, qui ne peut cacher une forêt d’idées visuelles et sonores marquantes au service d’une tension insoutenable.

EN BREF

En Plein Feu est un vrai film catastrophe tendu, prenant et généreux dans ses choix de réalisation. Porté par des acteurs qui excellent dans leur rôle intimiste, le film de Quentin Reynaud, malgré quelques menues imperfections, est une preuve supplémentaire que le cinéma français est bien pourvu en cinéastes de talent,  inventifs lorsqu’il s’agit d’aborder le genre sans avoir les moyens d’une superproduction. 

3.4/5

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1 Comment

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